Il fallait bien que ça arrive. Jour après jour la lumière grignote la nuit. Bientôt le soleil refusera d’aller se coucher, l’heure du retour a sonné.
le dernier "vu de ma fenêtre" à midi
lundi 23 avril 2018
lever du soleil : 4h27
coucher du soleil : 22h18
température : on frôle le zéro
météo : d’une heure à l’autre, white-out et grand beau, pas de vent
Lorsque vous lirez ces lignes, je survolerai une dernière fois le fjord, le village, les montagnes. Voici la fin de ces six mois de l’Expérience i-Nuit. Je n’arrive plus à imaginer le vert du gazon, l’émeraude de l’océan, le bruit de la ville. Je quitte mon cocon de glace, je saute dans l’inconnu de ma vie d’avant.
vu de ma fenêtre, 5 heures plus tard
La lumière est devenue si violente. Elle s’infiltre partout, blesse les yeux derrière les lunettes protectrices, vous accapare sans répit, écrase les reliefs. Le besoin de sommeil s’évanouit. Le blanc de la neige, celui de la glace, sont des miroirs implacables. Tout irradie, tout vibre.
Ainsi la boucle est bouclée. Lorsque je suis arrivée le 1er novembre, c’est la nuit qui grignotait le jour. Combien de mois me faudra t-il pour assimiler toute la puissance, l’intensité de ce long hiver fait de découvertes, de rencontres, de merveilles et de chocs ?
bientôt minuit
Je me dois ici de rendre hommage à notre cher Commandant Charcot, en partageant avec vous ces lignes qui m’ont fait aimé le Scoresby Sund avant même d’y pointer l’étrave de notre voilier. Il écrivait, en 1926 à bord du Pourquoi Pas ? alors qu'il franchissait la ceinture de glace qui encombre l'entrée du fjord en plein été :
« Le soleil se couchait derrière les hautes montagnes, pour se lever presque aussitôt, il incendia la côte Nord du Sund et colora d'un rose tendre et féerique la splendide ligne des glaciers de la rive Sud. Le ciel était taché seulement d'une main nuageuse de fine dentelle amarante qui se tendait comme pour nous souhaiter la bienvenue. »
Le délicat bruant des neiges annonce le printemps, l’expérience s’achève mais non point le Blog.
Il reste tant à raconter, tenter d’expliquer, ces images que ma maigre liaison internet ne m’a pas permis de partager. Il y a tous ces albums de merveilleuses photos égoïstement gardées, ces vidéos qui sont encore dans la boîte à images.
Je vous dirai, en léger différé, les racontars et les histoires vraies qui se confondent, l’histoire parfois française du Scoresby Sund, l’avenir incertain, les mystères cachés rétifs à se laisser raconter sur cette communauté du bout du Nord.
Viendra enfin le temps de répondre aux questions des lecteurs, de proposer lectures, films, sites web pour tous les curieux qui veulent aller plus loin dans ce voyage.
A tous ceux qui ont fidèlement lu ces chroniques, à tous les lecteurs de passage, à ceux qui ont regardé ces pages malgré l’obstacle de la langue, à ceux qui n’ont rien dit et à ceux qui ont questionné, commenté, je dis un immense QUJANAQ !
[à suivre]
Commentaires
Que dire de plus, sinon vous renouveler d'un énaurme MERCI, pour ce magnifique partage qui nous a fait découvrir, avant de l'aimer??, une région, une vie inconnus sinon improbables...et en attendant avec impatience le "complément" annoncé!! à bientôt de vous lire, et de parcourir les photos encore "cachées".
Claude du Vaucluse
et bien sûr, bienvenue pour ce retour sur la planète dite civilisée, en espérant que le choc ne sera pas trop intense, et la réadaptation la plus douce possible..
Merci pour le partage. Ici, vous verrez, les mésanges sont revenues, les arbres verdissent, les jardins fleurissent et offriront bientôt quelques légumes. Je me souviens d'une transition du chaud au froid en revenant d'Asie, celle-ci va vous faire croire que nous sommes sous les tropiques. Je vous souhaite une bonne réadaptation à votre vie d'avant. Ce blog était une belle expérience aussi pour nous, lecteurs, et, en ce qui me concerne, j'attends la suite avec impatience.
Ishisho, un grand merci, à travers vos photos j'ai retrouvé les émotions vécues aux vacances de Pâques 1992 sur l'île Disko. Vos commentaires m'ont beaucoup plus surtout sur la réalité des chasseurs d'ours.
Je vous félicite d'avoir entrepris cette belle aventure et de nous témoigner de la vie de ce peuple si raisonnable comparé à notre mode de gaspillage. Bon retour
Salut Dominique,
Nous te souhaitons un beau voyage de retour et un atterrissage aussi doux que possible après ces quelques mois passés si loin de l'agitation de nos villes... Ce sera avec bonheur que nous viendrons contempler tes histoires en photos, films et anecdotes, mais avant, il te faut passer par le sas de réadaptation, alors prends ton temps pour cette transition vers l'été des pays tempérés et la civilisation occidentale... on t'embrasse bien fort !
Coco et Bruno
Merci beaucoup de nous avoir permis si gracieusement de t'accompagner par la pensée, alors que nous sommes restés dans nos environnements douillets.
Un grand merci et bon retour dans votre vie d'avant.
Que dire sauf l'envie de suivre vos traces....
Merci pour cet hiver, merci pour ces histoires, merci pour ces images, merci pour ce voyage à distance.
A bientôt.
OUI, tu nous as envoyé de magnifiques chroniques, photos et aventures … et pour ces moments de lecture … merci !
Je ne doute pas que tu as du t'emplir de tout cet hiver, de tout ce blanc et surtout de toutes ces personnes que tu as croisées et avec qui tu as partagé la vie. Quelle belle aventure !
Je te souhaite un bon retour en terre de France … avec les retrouvailles des tiens qui sans aucun doute seront chaleureuses et admiratives !
à bientôt
nathalie
Déjà ! Heureusement que vous nous annoncez déjà la suite car j'aurais été bien peine que le blog s'arrête !
Bon retour à vous
Notre Maison,
avant même d'être là, nous y étions déjà , la peau à vif, le regard clair, et nous pensions y avoir séjourné toute notre vie, des étincelles qui jamais ne s'éteignent dans le Grand Blanc où même les peaux mates sont à domicile, et jusqu'alors protégée par des millénaires de glaciation, l'endroit unique et fragile pour prolonger les rêves et les peupler d'êtres invisibles, la toundra immense et qui déjà nous manque, une fois sa chair goûtée.....
Ami poète, comment te remercier de tous ces mots magiques qui accompagnent ces modestes chroniques. De grâce, publie ce recueil !