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Un été 1968 à Iddaaimi

En 1968, il y avait la plage sous les pavés du quartier latin. Et pendant ce temps là, une très jeune anthropologue française arrivait à Ittoqqortoormiit par le bateau ravitailleur d'été. Joëlle Robert-Lamblin nous lègue ce film beau et rare, en écho au film Piniartoq d'aujourd'hui. Cinquante années séparent la mission de l'anthropologue de mon expérience hivernale. Autres temps, mais pas vraiment autres mœurs.

Découvrez Banquise d'été en cliquant sur ce lien du CNRS.https://videotheque.cnrs.fr/doc=516

L’image contient peut-être : 2 personnes, personnes souriantes, enfant, ciel et plein air

Joëlle Robert-Lamblin en 1968 avec l'une des fillettes du village, cliché d'un habitant

Lorsqu'elle arrive à Ittoqqortoormiit à l'été 1968, Joëlle Robert-Lamblin s'est fixée une mission : témoigner de la vie quotidienne des chasseurs et de leurs familles, avant qu'il ne soit trop tard.

Joëlle débarque par le premier bateau d'été dans cette communauté de 500 habitants. Pas d'avion à l'époque, le village n'est relié au reste du monde que par le bateau estival venu du Danemark. Courageuse, notre jeune anthropologue part vivre avec une famille de chasseur du hameau voisin de Iddaaimi, Kap Hope comme disent les danois et les cartes, de l'autre côté de la baie des morses. Là les 125 habitants vivent essentiellement de la chasse.

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Josua et Dorthe-Dipu Barselajsen en deux de leurs derniers enfants, 1968, cliché JRL

Pendant deux mois, elle habite chez Josua et Dorthe-Dipu Barselajsen et leurs enfants. Elle devient Franski nuliakka, quelque chose d'affectueux comme "la petite femme française". Certains à Ittoqqortoormiit qui étaient enfants en 1968 se souviennent encore aujourd'hui de cette jeune femme blonde et souriante qui étonnait par sa connaissance du dialecte Tunumiusu.

Mais pourquoi donc cette mission?  Il fallait témoigner de cette vie encore traditionnelle avant qu'il ne soit trop tard, puisque la décision a été prise de fermer ce hameau et déplacer les familles à Ittoqqortoormiit. Pour des raisons économiques, l'histoire est un éternel recommencement. Alors Joëlle Robert-Lamblin étudie, observe, note, enregistre et pour notre plus grand bonheur, filme.

p-scoresby1968-9-1 b-Kap Hope, enfants de Magtigalat Arke et de Noa Madsen.jpg
Joëlle Robert-Lamblin et les enfants de Magtigalat Arke et de Noa Madsen, cliché d'un habitant

Tout est dit dans ce court métrage de cette vie de chasseur rude et laborieuse, où les rôles sont répartis entre hommes et femmes selon des savoir-faire d'une adaptation parfaite.

Finalement, le hameau ne sera démantelé... qu'en 2006 et en effet pour des raisons économiques. Entre temps, le hameau idéalement situé et si riche en gibier, s'est épanoui. Église et école partagent une même maison sur les hauteurs, l'église à droite, l'école à gauche de part et d'autre du couloir. Plus bas, près du rivage, le magasin et le groupe diesel qui alimente le hameau en électricité. Les canots à moteur ont remplacé les kayaks, les maisons sont devenues confortables. Il fait bon y vivre, face à ce fjord sublime et Martin le jeune chasseur du film Piniartoq parle de son enfance à Iddaaimi avec une belle émotion.

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sur les hauteurs d'Iddaaimi aujourd'hui, cliché DS

Hameau démantelé ? en apparence seulement. Car ils sont nombreux les Ittoqqortoormiut à avoir gardé en bon état la maison familiale. Et quel bonheur de s'y retrouver à l'occasion d'un week-end, ou de s'y abriter au retour de la chasse. Il y a même le chasseur Jens-Emil, qui vit là, seul, par tous les temps, avec pour seuls compagnons ses chiens, son traîneau et ses fusils.

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Retour de chasse à Iddaaimi aujourd'hui, cliché DS

Joëlle Robert-Lamblin : c'est à elle que nous devons le magistral "La Civilisation du Phoque", ce double volume des notes et croquis ramenés par Paul Émile Victor.

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Banquise d'été , un film de Joëlle Robert-Lamblin, CNRS et CFE, 1969
Image et son : Joëlle Robert-Lamblin, montage Ph. Luzuy
Production : CNRS Images

Le film en quelques mots : à 70° de latitude Nord, sur la côte Est du Groenland, près de l'embouchure du gigantesque Scoresby Fjord, vit une petite communauté de 500 habitants, totalement isolée du reste du mode pendant dix mois de l'année. Le film montre la vie quotidienne d'une famille de chasseurs en été dans le petit hameau de Kap Hope où les 125 habitants, tous groenlandais, vivent principalement de la chasse au phoque. Les hommes construisent leurs kayaks, partent chasser, attendent le gibier sur les plaques de banquise, dirigent leur traîneau utilisé comme moyen de transport même en été. Les femmes quant à elles préparent les peaux de phoques, découpent le gibier et préparent les repas. Le film est une illustration très vivante de la juxtaposition entre les deux cultures d'aujourd'hui : la tradition arctique et la culture européenne.

Commentaires

  • Merci Dominique de nous faire connaître ce film.
    Beaucoup de changements en 50 ans.
    Que pensera t-on dans 49 ans d'un hiver à Ittoqqortoormiit ?
    Est-ce qu'il y aura des anthropologues pour s'y intéresser ?
    Amitiés

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